A ceux qui viennent à ma rencontre.
Je suis dans une situation paradoxale, car je souhaite exposer, ma vision d’une réalité indicible. C’est le prétexte de ma peinture, sa raison d’être. Le langage simple de la parole ne suffit pas à raconter ce qu’il en est.
C’est pourquoi il faudra voir.
Je suis né en 1955 à la frontière belge, près de Lille. J’ai suivi des études d’arts plastiques de l’autre côté de la frontière, à Tournai (institut St Luc).
Ce que j’explore, c’est le mystère de la relation des couleurs entre elles, des masses, des formes, des ombres et des clairs. Je vais voir ce qui se passe dans la transaction, dans l’arrangement, à l’image de l’engagement des gens entre eux. La perception du groupe n’est jamais loin.
Tenter de restituer l’abstraction des sentiments et émotions dans ce qu’ils ont d’ineffables m’engage.
La peinture, la sculpture c’est aussi, de façon plus archaïque, l’exercice d’un rapport purement plastique à la matière, comme l’utilisation d’un dialecte particulier.
C’est l’œil porté, l’écoute, le regard et la respiration qui comptent, la poésie dégagée, parfois en marge, parfois au centre.
C’est aussi le pas de côté, le décalage, l’attirance ou le drame qui, comme la violence des situations ou des actions, révèle cette partie des humains, non ordinaire, qui donne à comprendre.
L’art, comme je le comprends, c’est une sensibilité à ces relationnels-là. Ce n’est pas l’esprit mais le cœur, la compassion, la connivence, la complicité.
Dans ce que nous empoignons dans la vie, quoi qu’on fasse, la manière compte.
C’est la touche posée qui jubile, qui donne, peut-être à tort, la plénitude de l’instant, du moment. Le geste qui rassure ou transporte, dans un univers transcendé, des notes qui évoquent l’émotion, dans un instant singulier, interprété ou non.
Les émotions parlent aux émotions dans un langage, dont la grammaire et la syntaxe non écrites, sont malléables et interprétables. C’est de l’à-peu-près essentiel.
Tout est nourriture pour l’artiste s’il emmagasine l’éprouvé et le restitue sincèrement.
Bernard DUTILLEUL